Le nouveau bâtonnier du Luxembourg alerte sur le déficit d'avocats hautement spécialisés dans certains domaines.
Décideurs. Y a-t-il un vrai manque d’avocats au Luxembourg ?
Rosario Grasso.
En réalité, le nombre d’avocats au Luxembourg est en pleine croissance, avec 2 203 avocats en 2014 pour 2 013 l’année passée. En revanche, le Luxembourg souffre du manque d’avocats hautement spécialisés dans des domaines spécifiques : le droit des assurances et réassurances, des télécommunications, de la protection des données personnelles, le droit d’auteur ou encore le droit financier, particulièrement des fonds d’investissement. Les cabinets recherchent des profils seniors d’avocats bénéficiant aussi d’une formation universitaire spécialisée et d’une expérience professionnelle réelle et significative.

Décideurs. Ce manque d’avocat est-il dû à l’abandon des activités liées au secret bancaire ?
R. G.
Le secret bancaire n’a jamais été absolu. Son abandon a été annoncé depuis de nombreuses années et l’instauration de l’échange automatique des informations en matière fiscale montre bien que notre place financière ne vit pas de ce secret ou d’avantages fiscaux. Il existe des niches fiscales partout en Europe. Le secret bancaire n’a jamais été notre unique source de business. Au Luxembourg comme en France, il interdit de communiquer des données bancaires personnelles à des tiers non autorisés. En revanche, le Luxembourg est le premier pays européen et le second sur le plan mondial en matière de fonds d’investissement présents. La place financière doit conserver son rang et son image, qu’elle ne pourra qu’améliorer, ce qui rend les cabinets de plus en plus exigeants dans les recrutements.
Les prestations offertes par les cabinets d’avocats d’affaires ont évolué. Très fortement axés vers le droit fiscal et financier, les cabinets diversifient leur offre pour répondre aux besoins spécifiques de leurs clients, souvent des grands groupes internationaux cherchant un panel complet de services juridiques et fiscaux.

Décideurs. Les avocats étrangers sont très nombreux au Luxembourg. Cette immigration n’est-elle pas suffisante ?
R. G.
Il est vrai que les avocats exerçant sous leur titre d’origine, français, belges, allemands, néerlandais, espagnols, portugais ou italiens, sont nombreux dans le pays. Depuis plus de cinq ans, on constate une forte augmentation du nombre de ces avocats qui viennent exercer chez nous après quelques simples vérifications et une inscription au barreau du Luxembourg, conformément au droit de l’Union européenne. Cet afflux d’avocats étrangers ne comble qu’en partie notre besoin d’avocats dans des matières spécifiques, où une spécialisation et une expertise prononcées sont exigées. Notre barreau a toujours été ouvert et nos confrères étrangers répondant à nos exigences sont les bienvenus au Luxembourg !

Décideurs. Le nombre d’avocats est très élevé proportionnellement à la population. Cela ne révèle-t-il pas une forme de saturation du marché des avocats au Luxembourg ?
R. G.
Effectivement, il y a quatre cents avocats pour cent mille habitants, contre quatre-vingt-dix en France par exemple. Cependant, ce ratio très élevé est justifié par la place centrale du Luxembourg dans l’Union européenne, par son savoir-faire établi et reconnu dans toutes les matières financières et par les enjeux financiers énormes qui y ont cours. De nombreuses sociétés internationales développent leurs activités en passant par le Luxembourg ou sur place, dans les secteurs des assurances et réassurances ou des télécommunications. Le Grand-Duché est un lieu privilégié de développement pour de nombreuses entreprises présentes sur place comme IBM, Microsoft, Amazon, EBay ou le siège d’I-Tunes.

Décideurs. Les cabinets anglo-saxons sont très présents dans le pays. Ne craignez-vous pas une trop forte concurrence ?
R. G.
Nombreux sont les cabinets anglo-saxons à avoir fait l’arbitrage entre continuer à travailler auprès de leurs clients pour leurs activités au Luxembourg depuis une plateforme à l’étranger ou ouvrir un bureau local pour privilégier la proximité. Les arrivées récentes de SJ Berwin, Hogan Lovells ou la consolidation du bureau de DLA Piper en sont quelques exemples. Il est vrai que ces cabinets retirent une part du marché aux cabinets d’affaires locaux. Mais ils ne doivent pas être considérés comme une menace. Tout d’abord, ils ne traitent souvent que leur propre clientèle sur place. Nombreux sont les situations de conflits d’intérêts ou de contentieux pour lesquelles un avocat local est sollicité. Ensuite, rares sont ceux qui pratiquent le droit luxembourgeois. Enfin, leur présence démontre que le Luxembourg est bien une plate-forme internationale incontournable qui a sa place et son importance dans notre monde globalisé. Ils nous honorent donc de leur présence !
À titre personnel, nous sommes très attachés à l’indépendance de notre cabinet et nous entretenons une cohabitation efficace avec les anglo-saxons.

Propos receuillis par Pascale D'Amore

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