Le 6 juin dernier, le gouvernement Philippe annonçait l’introduction d’un « programme de travail pour réformer notre modèle social ». Depuis, une série d’entretiens avec les organisations syndicales et les patrons a porté sur l’articulation entre loi et niveaux de concertation. Cette phase d’observation terminée, les négociations vont pouvoir vraiment commencer.

Depuis dix ans, le dialogue social à la française se solde par un échec. Pire, on dirait qu’il paralyse les réformes, à l’image des négociations interminables lors de la Conférence sociale de 2014 qui avait été désertée par certains syndicats. Afin de renforcer la qualité du dialogue et de restaurer la confiance entre les partenaires sociaux, Emmanuel Macron veut instaurer un nouveau rapport de force. Pas sûr néanmoins qu’il soit des plus équitables. Passage en revue des forces et faiblesses de chacune des parties.

Le choix des sujets traités : avantage Macron

Première mise en œuvre : la réforme du droit du travail, qui doit être active dans dix-huit mois. Pour certains, elle aboutira uniquement à une dégradation de la condition salariale en développant une concurrence portée sur une forme de « minimum syndical ». Pour d’autres, elle est nécessaire – tout comme les cinq autres réformes qui la complètent. Selon ses défenseurs, la recherche de flexibilité et la baisse du coût du travail doperont la compétitivité française, résultant en une fluidification du marché du travail et favorisant in fine l’emploi. Ces hypothèses reposent largement sur l’orientation idéologique des centres de recherche et think-tanks libéraux, dominateurs historiques des débats économiques.

Communication : match nul

Par ailleurs, vingt-quatre fédérations de la CGT ont fait appel à la justice contre la loi travail en dénonçant sa possible non-conformité à la Constitution. Parmi eux : Randstad, Alstom Transport, Marks & Spencer Île-de-France et le syndicat amiénois de… Goodyear. Pour ces syndicats comme pour le reste de l’opposition, l’avant-projet permettant au Parlement de légiférer par ordonnances dénature non seulement les négociations mais constitue surtout un abus de pouvoir. Les syndicats déplorent également l’accent mis sur la concertation plutôt que sur la négociation entre les partenaires sociaux. Pour cette raison, la CGT a déjà appelé à la grève générale le 12 septembre prochain. De l’autre côté, la communication est huilée et le flou entretenu autour des mesures concrètes du projet de loi permet au gouvernement Philippe de gagner du temps, tout en faisant valoir sa qualité d’écoute.

Négociations : avantage Macron

La recomposition du code du travail, la formation des représentants des salariés, la primauté des accords d’entreprise sur les accords de branche (ainsi que le recours au référendum à l’initiative de l’employeur) ou encore le plafonnement des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif sont des mesures accueillies très favorablement par les gestionnaires du capital humain en entreprise. Selon une étude de l’ANDRH, 79 % d’entre eux sont favorables aux options citées ci-dessus et estiment qu’elles « ne se substituent pas au dialogue social ». Il n'en va pas de même des syndicats mais en se divisant pendant les mobilisations contre la première loi travail dite El Khomri entre les organisations « contestataires » (CGT et FO) et « réformistes » (CFDT, CFTC, Unsa), ils sont aujourd’hui affaiblis. Pour le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, les syndicats « doivent impérativement rebâtir un front commun pour faire face à un gouvernement [majoritaire] à l’Assemblée nationale ».

Le calendrier : avantage Macron

« Nous voulons aller vite » a déclaré la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, en comparant la loi travail à un Rubik’s Cube – un casse-tête réussi lorsque toutes les faces du cube sont complétées. Pour se faire, la consultation des partenaires sociaux s’érige comme la priorité. Ils auront bien jusqu’au 21 juillet pour se faire entendre et espérer peser sur les orientations du projet de loi d’habilitation, qui seront débattues au Parlement du 24 au 28 juillet. L’objectif est d’avoir fixé les ordonnances pour la fin du mois d’août, afin qu’elles soient validées par un nouveau Conseil des ministres avant le 20 septembre. Ce calendrier est restreint par la volonté d’Emmanuel Macron de ratifier les ordonnances de son plus gros projet quinquennal le plus vite possible. Voudrait-il « forcer » l’accord ? Le choix de la période estivale des grandes vacances, moins propice aux contestations publiques, n’est sûrement pas anodin.

Résultat : le gouvernement haut la main

Avec trois points à zéro, la victoire d’Emmanuel Macron sur les syndicats s’annonce éclatante. Le dialogue avec les partenaires sociaux se devra d’être sincère, au risque sinon d'allumer la mèche des manifestations. Pour les syndicats, le moment crucial arrivera à la rentrée et pendant toute la première moitié du mois de septembre. Ultime question en cas d'échec de ces discussions : les Français descendront-ils dans la rue ?

 

A.R.

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