L’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail est venue apporter des modifications sur le thème du télétravail...

Dans le rapport au président de la République relatif à l’ordonnance précitée, il est précisé : « Est instauré un droit au télétravail sécurisé, souple, permettant une meilleure conciliation de la vie professionnelle et de la vie personnelle. Alors qu'il ne concerne que 17 % des salariés aujourd'hui, le télétravail est une aspiration de 61 % des Français, parmi les jeunes générations, ou les salariés qui y trouvent une façon de mieux concilier vie privée, vie familiale et vie professionnelle. Il peut également être une réponse à des problématiques d'aménagement du territoire dans les zones rurales. Dans certains cas, les personnes en situation de handicap peuvent aussi y trouver une opportunité pour améliorer leurs conditions de travail, voire s'insérer de façon plus aisée dans l'emploi. »

Que prévoient les nouvelles dispositions ?

En premier lieu, la définition du télétravail est élargie. S’il s’agit toujours d’un travail qui bien qu’il puisse être également exécuté dans les locaux de l’entreprise, l’est en dehors de ceux-ci de façon volontaire et au moyen des technologies de l’information et de la communication, il n’est plus exigé que ce travail soit effectué de façon régulière ; le télétravail peut aussi être « occasionnel ».

En deuxième lieu, les modalités de recours au télétravail sont nouvelles. Précédemment, la mise en place du télétravail exigeait seulement la conclusion d’un contrat de travail ou un avenant à celui-ci, sans qu’il ne soit exigé la conclusion d’un accord collectif.

Désormais, pour recourir au télétravail de façon régulière ou occasionnelle, il devra être conclu un accord collectif (d’entreprise ou de branche) ou, si un tel accord n’existe pas, élaboré par l’employeur une charte après avis du comité social et économique.

Toutefois, en l’absence d’accord collectif ou de charte, le recours au télétravail occasionnel est permis sous réserve d’un accord entre l’employeur et le salarié qui sera formalisé par tout moyen (en pratique, pour des questions de preuve, la signature d’un contrat de travail ou d’un avenant semble devoir être privilégiée).

Autrement dit, s’il existe un accord collectif ou une charte ne prévoyant que le recours régulier au télétravail, il ne serait pas envisageable de recourir au télétravail de manière occasionnelle. S’il est donc souhaité une possibilité de recours au télétravail régulier et occasionnel, la prudence imposerait d’envisager les deux situations dans l’accord ou, à défaut, la charte.

L'accord collectif ou, à défaut, de la charte définit :

  • Les conditions de passage en télétravail et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
  • Les modalités d'acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
  • Les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
  • La détermination des plages horaires durant lesquelles l'employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail.

En troisième lieu, il est expressément prévu que le refus de l’employeur opposé à un salarié, alors même que le poste occupé par celui-ci est éligible au télétravail dans les conditions prévues par l’accord ou la charte, doit être motivé.

Ce refus doit reposer sur des raisons objectives et non discriminatoires. Il semble par exemple possible de prévoir, au sein de l’accord ou la charte, pour un même poste au sein d’un service, un nombre maximal de salariés bénéficiaires sur les mêmes journées du télétravail.

Comme actuellement, le refus du salarié d’accepter un poste de télétravailleur n’est pas un motif de rupture du contrat de travail.

En quatrième lieu, parmi les obligations de l’employeur à l’égard du salarié en télétravail, a été supprimée celle « de prendre en charge tous les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils, ainsi que la maintenance de ceux-ci ».

Nul doute que ce thème fera l’objet d’une discussion lors de la négociation de l’accord collectif.

Il est également expressément rappelé que le télétravailleur bénéficie des mêmes droits que les salariés exerçant leurs fonctions dans les locaux de l’entreprise (notamment, accès aux informations syndicales, participation aux élections professionnelles, accès à la formation).

En cinquième lieu, il est affirmé qu’est présumé être un accident travail, l’accident survenu au télétravailleur pendant son activité professionnelle, sur le lieu où celui-ci exerce le télétravail.

L’ensemble de ces nouvelles dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de l’ordonnance, soit à compter du 24 septembre 2017. Pour les salariés déjà en télétravail, il est prévu que les dispositions de l’accord collectif ou de la charte se substituent aux clauses contraires ou incompatibles à celles figurant dans le contrat de travail du salarié concerné, sauf refus de celui-ci dans le mois suivant la date à laquelle l’accord ou la charte a été communiqué dans l’entreprise.

Les objectifs de sécurité, de souplesse et de meilleure conciliation de la vie professionnelle et de la vie personnelle recherchés dans le droit du télétravail semblent être facilités par la nouvelle définition du télétravail, plus large que la précédente et par la définition des modalités de recours et d’organisation du télétravail par voie d’accord collectif ou, à défaut, de charte pouvant présenter l’avantage d’envisager des dispositions adaptées à l’entreprise et communes à tous les télétravailleurs.

Reste à voir si, en pratique, ces nouvelles modalités permettront réellement un développement du télétravail.

 

Marylène Aloyau, Avocat chez Capstan Avocats

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