Le gouvernement a sorti le chéquier : la non-livraison des Mistral à la Russie coûtera 949,8 millions d’euros. Mais l’État omet de mentionner les coûts indirects liés aux deux navires.

Paris s’est mis d’accord avec Moscou, il lui en coûtera 950 millions d’euros pour l’annulation de la vente des navires Mistral. L’ultime étape étant pour le texte de passer devant la commission des Affaires étrangères. Pendant les huit mois de négociations qui ont précédé l’accord, Moscou réclamait 1,16 milliard d’euros pour le préjudice subi. Le pays mettait en avant les sommes dépensées afin de former 400 marins qui devaient constituer l’équipage des Mistral.


Huit mois de polémique

 

Le Canard enchaîné s’était emparé de ces revendications, expliquant que la rupture du contrat et les frais dépensés par la Fédération russe porteraient la note à plus de deux milliards d’euros. À l’issue du Conseil des ministres du mercredi 26 août, le porte-parole du gouvernement avait démenti au micro de France Info : « Je le redis, ce coût est inférieur à un milliard. Cela comprend toutes les avances qui avaient été faites par les Russes à propos de ces Mistral. » Pour rappel, le prix de vente des deux bâtiments était fixé à 1,2 milliard d’euros. L’accord de vente initial avait été signé sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Depuis, les actions de la Russie en Crimée et en Ukraine avaient placé Paris dans une situation inconfortable. Tiraillé entre les intérêts économiques français et les sanctions imposées à Moscou par l’Union européenne, François Hollande a dû faire un choix. Fin novembre 2014, il a décidé de repousser la livraison de la commande « jusqu’à nouvel ordre ». Le premier Mistral, le Vladivostok, devait de fait être livré au Kremlin à la mi-novembre 2014 et le second à l’automne 2015. Le choix du gouvernement a provoqué l’ire des Républicains et du Front national. Oubliant toute considération diplomatique et géopolitique conjoncturelle, voire d’éthique, les premiers reprochent à l’administration la perte d’un contrat de plus d’un milliard d’euros, la dégradation de la crédibilité commerciale et le flou entourant les chiffres exacts de l’accord avec Moscou.


Un million d’euros par mois

 

Si cette partie du voile est levée, les coûts indirects n’ont pas été évoqués. Interrogé en juillet dernier, Hervé Guillou, le patron du constructeur des Mistral, DCNS, avait indiqué que le coût de maintenance des navires s’élèverait à un million d’euros par mois au moins. De plus, déjà adaptés pour un usage russe, les deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) devront nécessairement être modifiés pour leur nouvel acquéreur. Des frais supplémentaires, estimés à 200 millions d’euros par le Canard enchaîné, qui ne placent pas Paris dans une bonne position pour négocier. Début août, François Hollande indiquait pourtant que la France n’aurait aucun mal à trouver des repreneurs, fait confirmé par son porte-parole : « Des négociations sont en cours », affirmait-il. Les suppositions vont bon train : La Tribune citait notamment l’Arabie saoudite, l’Égypte, les Émirats arabes unis ou encore Singapour. Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui s’est rendu le week-end dernier en Malaisie, aurait profité de l’occasion pour tenter de revendre l’un des navires-multifonction. Si le ministre malaisien de la Défense, Hishammuddin Hussein, s’est dit intéressé par les chasseurs Rafale, les Mistral ne semblent pas avoir soulevé l’enthousiasme. 

 

 

Sophia Sanni Soulé

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