Par Aurélien Louvet, avocat associé, et Julien Aunis, avocat, Capstan Avocats

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L’autoentrepreneur, un régime simple et flexible différent de celui du salariat

Le statut d’autoentrepreneur a été créé en 2008[1] pour répondre à un besoin de simplification de l’exercice individuel et indépendant d’une activité à but lucratif. L’objectif était de faciliter le développement d’une activité indépendante à titre principal ou en complément d’une activité salariée, étudiante voire de la perception d’une pension de retraite[2].

L’autoentrepreneur est un prestataire de services comme un autre, apportant tant à des particuliers, qu’à des professionnels, des compétences dont ils ne disposent pas. Il doit être immatriculé au registre du commerce et des sociétés (RCS), peut collaborer avec plusieurs sociétés/particuliers et dispose d’une autonomie dans l’organisation de ses missions. Ce statut permet à son titulaire de bénéficier d’un sort social et fiscal avantageux des sommes perçues, mais il se trouve en contrepartie limité dans le chiffre d’affaires qu’il peut générer tous les ans (32.900€ hors cas de vente de produits ou de prestation d’hébergement).

L’autoentrepreneur se différencie du salarié notamment par la liberté dont il est titulaire en contrepartie d’une sécurité moins importante, ce dernier ne bénéficiant pas des dispositions du Code du travail. A ce titre, il existe une présomption de non salariat des personnes physiques immatriculées au RCS[3] et/ou dont les conditions d’intervention sont définies exclusivement par le prestataire ou par le contrat de prestation de services[4].

L’autoentrepreneur peut être requalifié en salarié par le juge

Face à une demande de reconnaissance d’un contrat de travail d’un autoentrepreneur, et malgré la présomption de non salariat, le juge vérifie si les critères du contrat de travail sont réunis : existence d’une prestation de travail, d’une rémunération mais surtout d’un lien de subordination (ordres, contrôle, sanctions…).

Ce type de contestation se multiplie en raison du nombre grandissant d’autoentrepreneurs (près d’un million à fin 2014) mais aussi du recours de plus en plus régulier par des entreprises à une collectivité d’autoentrepreneurs pour effectuer certaines tâches (VTC, livraison...).

La Cour de cassation, faisant une juste application des critères du salariat vient très récemment de rejeter la demande de requalification d’un autoentrepreneur aux motifs notamment, qu’il ne démontrait pas être à la disposition permanente du donneur d’ordres, qu’il restait libre d’effectuer les missions proposées par ce dernier et d’exécuter ses prestations à sa manière[5].

Les conséquences d’une requalification en contrat de travail de la relation entre le client et l’autoentrepreneur peuvent être lourdes pour l’entreprise reconnue employeur :

Civiles : demandes de rappel de salaires (heures supplémentaires, congés payés) ; indemnité pour travail dissimulé, et dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse si la relation a pris fin ; Administratives : le préfet peut refuser d’accorder pendant une durée maximale de 5 ans certaines aides publiques en matière d’emploi ainsi que demander le remboursement des aides perçues sur les 12 derniers mois. Il peut également fermer l’établissement ayant servi à commettre l’infraction et ce pendant 3 mois maximum. Pénales : condamnation au titre du travail dissimulé ; interdiction définitive ou pour une durée de 5 ans au plus, d’exercer directement une ou plusieurs activités professionnelles ; la fermeture définitive ou pour une durée de 5 ans au plus des établissements ayant servi à commettre les faits incriminés ; l’interdiction pour une durée de 5 ans au plus, de percevoir toute aide publique.

Il existe également un risque de redressement URSSAF sur les sommes versées à l’autoentrepreneur et qui auraient dues être soumises à charges sociales.

Les bonnes pratiques à observer en cas de recours aux autoentrepreneurs….

L’autoentrepreneur doit être considéré par son client comme un professionnel indépendant, autonome dans la gestion de son activité et dans la réalisation des prestations qui lui sont confiées, le cas échéant dans le respect des règles contractuelles fixées entre les parties.

Les entreprises doivent notamment :

s’assurer que le prestataire s’est immatriculé au RCS ; négocier avec lui de manière précise les conditions du contrat de prestation de services et l’étendue de sa mission ; éviter des références à une relation salariée (facturation vs rémunération par exemple ; hors taxe vs brut) ; laisser le maximum d’autonomie à leur prestataire (liberté dans les jours et les heures de la prestation ; possibilité de travailler pour d’autres clients…).

 

Dans une économie dégradée et impactée par la révolution digitale, le statut d’autoentrepreneur constitue un régime en plein développement, complémentaire du salariat. Il permet plus facilement à des personnes éloignées de l’emploi de retrouver une activité et à des entreprises, notamment beaucoup de start-up, d’avoir un recours facile à une main d’œuvre indépendante. Le projet de loi Macron II devrait venir conforter en 2016 le régime de l’autoentrepreneur, il serait utile qu’à cette occasion la frontière avec le statut de salarié soit réaffirmée et la présomption de non salariat renforcée.

 

[1] Loi n°2008-776 du 22 juillet 2008 dit « Loi de modernisation économique ».

 

[3] Article L.8221-6 du Code du travail

[4] Article L.8221-6-1 du Code du travail

[5] Cass. Soc. 20 octobre 2015 n°14-16179

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