Longtemps réservé aux particuliers, le financement participatif a su séduire les entreprises. Les plates-formes que la rédaction vous conseille.
D’ici 2020, le crowdfunding devrait représenter 2,2 milliards d’euros par an, soit 1 % de l’épargne des ménages français. « Ce secteur se divise en trois activités : le don, le prêt et le capital. Le don représente environ 40 % du marché. Les deux autres métiers commencent tout juste à se développer », détaille Arnaud Poissonnier, fondateur de Babyloan. Quant au financement participatif dédié aux entreprises, il a progressé de 100 % en 2014 et représente désormais près de 30 % du marché. Mieux encore, le crowdfunding a réussi à gagner le respect des autres acteurs institutionnels. « Désormais, nous travaillons même sur des dossiers apportés par des fonds qui cherchent des co-investisseurs dans le cadre d’un deuxième tour », témoigne Stéphanie Savel, P-DG de Wiseed.

Une révolution

L’essor de ce nouveau moyen de financement est une aubaine pour des start-up et des PME qui manquent cruellement de moyens de financement. Pour François Carbone, co-fondateur d’Anaxago, il s’agit là d’une véritable révolution : « Le crowdfunding permet de démocratiser l’investissement dans les start-up. C’est une véritable révolution. À moyen terme, les fonds de collecte plus traditionnels sont amenés à disparaître. Ce mode de financement permet également un échange constructif entre les investisseurs et les entrepreneurs. » Depuis la publication du décret d’encadrement de l’activité, en octobre 2014, une vingtaine de plates-formes ont été homologuées, une dizaine dans le crowdfunding en prêt et une autre dans le financement participatif en capital.

« Dans ce dernier secteur, il y a un véritable effet de gravité. Plus les plate-formes ont une taille conséquente, plus elles attirent les dossiers et les investisseurs. Selon moi, il ne peut pas y avoir, à terme, plus de deux grands acteurs sur ce marché », analyse François Carbone. « Depuis la mise en place de la réglementation, le métier a acquis une crédibilité auprès des investisseurs professionnels, des particuliers et des entrepreneurs. Cette professionnalisation implique des moyens humains importants », ajoute Stéphanie Savel. Un constat quasi-identique pour le crowdlending (le prêt). Pour autant, la course à la taille doit se faire de façon raisonnée : « Comme ce marché s’adresse encore aux early adopters, il est important que nos plates-formes n’investissent pas trop vite », prévient Philippe Gaborieau, fondateur d’Happy Capital. Il y aura donc bien un écrémage au cours des deux années à venir. Voici les cinq plate-formes sur lesquelles la rédaction parie.

Anaxago : à toute vitesse

> Type : crowdinvesting
> Date de création : 2012
> Montant levé depuis la création : 11,2 M€
> Montant moyen levé : 300 K€
> Nombre d’opérations réalisées en 2014 : 20
> Effectifs : 12

Mise en ligne en mai 2012, la plate-forme créée par trois anciens élèves de l’université Paris-Dauphine connaît un succès rapide. Et pour financer leur croissance, ils ont utilisé… le crowdfunding. Un moyen de montrer que cette méthode de financement, alors à ses balbutiements, fonctionnait bien. C’est ainsi qu’en décembre 2012, ils parviennent à récolter 140 000 euros.
Depuis sa création, Anaxago a de son côté permis de lever 11,2 millions d’euros. « Et si l’on prend en compte les co-investissements, il faut rajouter au moins quatre millions d’euros », précise François Carbone, l’un des co-fondateurs. En mars 2014, Kalelithosa, promoteur immobilier montpelliérain a réussi à lever 1,8 million d’euros sur la plate-forme. Six mois plus tard Payplug, une start-up de paiement en ligne, récoltait 900 000 euros. Ce n’est qu’à l’été 2014 qu’Anaxago passe la vitesse supérieure en réunissant, toujours grâce au financement participatif, deux millions d’euros.


Happy Capital : place au conseil

> Type : crowdinvesting
> Date de création : 2013
> Montant levé depuis la création : 3,5 M€
> Montant moyen levé : 290 K€
> Nombre d’opérations réalisées en 2014 : 6
> Effectifs : 4

Philippe Gaborieau, fondateur d’Happy Capital, s’est fait remarquer en décembre 2014 en annonçant vouloir racheter Wiseed, l’un de ses principaux concurrents. Une offre que ce dernier a néanmoins refusée. L’opération aurait abouti à la création du nouveau leader du marché.
La plate-forme parisienne se démarque de ses concurrents par le profil de son président : Philippe Gaborieau est le seul à diriger par ailleurs un cabinet de conseil en fusions et acquisitions. Une expérience qui lui permet d’apporter dès le départ une réflexion sur la structuration financière de l’opération. En 2014, Happy Capital a levé 800 000 euros pour Biosantech (lire notre témoignage ci-après) et 320 000 euros pour Art of soule, une société fabricant des espadrilles du Pays basque.

Wiseed : la force des régions

> Type : crowdinvesting
> Date de création : 2008
> Montant levé depuis la création : 14,6 M€
> Montant moyen levé : 280 K€
> Nombre d’opéra tions réalisées en 2014 : 15
> Effectifs : 11

Grâce à une vision très entrepreneuriale, la plate-forme toulousaine a réussi à s’imposer comme l’un des acteurs incontournables du secteur. Elle compte aujourd’hui des bureaux à Paris et à Lyon, ce qui lui permet de couvrir toutes les régions de France. En 2014, elle a aidé Newwind, société innovante d’énergie renouvelable, à réaliser un deuxième tour de table, levant au total un million d’euros. En 2015, Wiseed pourrait faire parler d'elle en participant au rachat de l’aéroport de Toulouse. Au cours d’une consultation en novembre 2014, 8 000 investisseurs ont faire part de leur intérêt pour un montant de plus de dix-huit millions d’euros. Face à cet engouement, la CCI de Toulouse a proposé à la plate-forme de co-investir avec elle. Si cela aboutissait, ce serait la première privatisation citoyenne au monde.

Lendopolis : de grandes ambitions

> Type : crowdlending
> Date de création : 2014
> Montant levé depuis la création : 446 K€
> Montant moyen levé : 50 K€
> Nombre d’opérations réalisées en 2014 : 8
> Effectifs : 9

Lendopolis comptait déjà 3 110 utilisateurs dont 712 investisseurs fin décembre 2014. Sur cette plate-forme, les prêts sont rémunérés à taux fixe entre 5 % et 10 % et le capital n’est pas garanti. En 2015, Vincent Ricordeau, le fondateur, compte lever entre trois et quatre millions d’euros et espère afficher par la suite « une croissance annuelle de 200 % à 300 %, comme pour notre autre plate-forme Kisskissbankbank ». Pour gagner en visibilité, la jeune société a réalisé un partenariat avec le groupe Les Échos. Et pour attirer les entrepreneurs, Lendopolis a signé un accord avec l’ordre des experts-comptables. Ces derniers réalisent une étude approfondie afin de donner leur autorisation. Cette barrière à l’entrée permet de garantir des dossiers de qualité aux investisseurs.

Babyloan : le leader européen du prêt solidaire

> Type : crowdlending solidaire
> Date de création : 2008
> Montant levé depuis la création : 3,6 M€
> Montant moyen levé : 3 000 € pour les projets français, 350 € pour ceux du « Sud »
> Nombre d’opérations réalisées en 2014 : 4 500
> Effectifs : 13

Babyloan propose à des particuliers de prêter de l’argent sans intérêt à des micro-entrepreneurs du monde entier. Pour sélectionner les projets, la plate-forme de financement solidaire travaille avec des institutions de microfinance internationales. « Grâce à des accords avec des institutions financières, nous voulons doubler de taille dans les deux ans à venir », ambitionne Arnaud Poissonnier, le fondateur. De nombreuses banques, telles que la Bred ou le Crédit coopératif, sont déjà partenaires. Pour financer son développement à l’international, Babyloan a réussi à lever 800 000 euros en 2014, dont 300 000 euros sur la plate-forme de crowdfunding Anaxago. Au vu du succès de l’opération, Arnaud Poissonier souhaite de nouveau utiliser la plate-forme de crowdfunding pour lever cette fois entre 200 et 300 000 euros.

TEMOIGNAGE : « Sans l’affect, je n’aurais jamais réussi à lever 800 000 euros »

Une question à Corinne Tréger, présidente et fondatrice de Biosantech, société développant un vaccin contre le sida.

Décideurs. Pourquoi avez-vous opté pour le crowdfunding ?
Corinne Tréger.
Un peu par hasard et beaucoup par défaut. Tous les autres acteurs du financement estimaient le projet trop risqué car nous étions à la première phase de test. C’est une amie qui m’a parlé de ce mode de financement alternatif. J’ai tenté ma chance et cela a marché ! J’ai pu partager ma passion avec les internautes : ils ont vu que j’étais quelqu’un de sincère.
Ma société n’a aucun salarié : nous travaillons avec des consultants et des bénévoles. Je pense que c’est mon implication et le sujet de recherche de ma société qui ont séduit. Sans l’affect, je n’aurais jamais réussi à lever 800 000 euros. Aujourd’hui, les tests ont bien avancé et sont concluants. J’espère que cela nous permettra de lever les sept millions d’euros nécessaires pour pouvoir continuer l’aventure jusqu’à la commercialisation du vaccin.

V. P.

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