Nouvelle marque, nouvelle offre, nouvelle stratégie digitale… En novembre 2016, Canal + repensait intégralement son business model pour faire face à sa perte de vitesse sur un marché de plus en plus concurrencé. Un an plus tard, les résultats sont là. Directeur marketing et commercial du groupe mais aussi fin connaisseur de l’univers des médias, Christophe Pinard-Legry revient sur les ingrédients de cette transformation et évoque les défis à venir.

Décideurs. Pour quelles raisons Canal+ a-t-il entrepris, il y a un an, de repenser l’intégralité de son business model ?

Christophe Pinard-Legry. Parce que son marché, celui de la Pay TV, était devenu extrêmement concurrencé.  L’offre Canal+, c’était du sport, du cinéma et des séries pour 40 euros par mois, ce qui, face à Netflix et à Bein Sport, accessibles à 10 et 15 euros par mois, représentait un prix d’accès élevé. En outre, la structuration de notre offre ne convenait plus au client ; nous nous sommes donc retrouvés très challengés sur un marché qui ne cessait de se réduire. C’est ce constat qui nous a décidés à revoir notre modèle.

Quelle forme a pris cette transformation ?

Elle a été menée sur trois fronts simultanés : l’offre existante a été restructurée, une offre digitale sans engagement a été lancée et des accords ont été conclus avec des opérateurs.

Pour faire face aux offres très agressives de nos concurrents, nous avons placé la chaîne Canal+ au cœur de notre offre en la rendant accessible à partir de 20 euros avec possibilité d’être complétée par un pack thématique – cinéma ou sport –, l’idée étant de permettre à nos clients d’enrichir la proposition de base avec des thématiques sur mesure. Résultat : notre offre est redevenue la plus compétitive du marché et, un an après son lancement, nous constatons une nette hausse du taux de satisfaction chez nos clients : neuf sur dix s’engagent sur 24 mois. Nous avons également lancé une marque – Canal – qui regroupe l’ensemble de nos offres, ce qui fait que nous sommes aujourd’hui le seul opérateur de Pay TV qui propose des contenus agrégés.

Quels ont été les effets de votre stratégie en matière de digital ?

Tout l’enjeu consistait à accélérer notre stratégie OTT (Over the top) portant sur les nouveaux usages de la télé via un accès direct à Internet. Pour cela nous avons lancé myCanal, une des meilleures applications télé du marché qui nous a réellement permis de moderniser l’expérience. Son succès est considérable. Aujourd’hui, Mycanal constitue non seulement un vecteur de fidélisation, mais aussi un outil de conquête.

Qu’en est-il de la concurrence venue des opérateurs télécoms ?

Depuis deux ans, SFR produit ses propres contenus. Pour répondre à cette concurrence nouvelle, Free et Orange nous ont proposé des accords de distribution leur permettant d’intégrer TV by Canal dans leur offre. Ajouté aux autres mutations entreprises, cela nous a permis de repartir en conquête et, surtout, de le faire auprès d’un public beaucoup plus large que par le passé ; Aujourd’hui nous gagnons chaque mois de nouveaux abonnés et nous avons endigué les pertes de clients que nous connaissions depuis plusieurs années. Être parvenus à inverser la tendance est d’autant plus essentiel sur un secteur en constante transformation tel que le nôtre.

Quels enjeux voyez-vous émerger de ce secteur en recomposition ?

Il y a encore quelques années, seuls les pure players de Pay TV occupaient le marché. Aujourd’hui, beaucoup d’acteurs – les opérateurs télécoms, les Gafa… – cherchent à y prendre pied en développant leur propre offre de contenu. Pour faire face à cette concurrence nouvelle, il est impératif que nous conservions ce qui a toujours fait la spécificité de notre positionnement : une offre garantissant le meilleur du sport et le meilleur du cinéma. Ceci, alors même que la concurrence accrue sur le secteur entraîne une augmentation des droits sportifs. Pour rester en position d’amortir l’acquisition de ces droits, le nombre de nos abonnés doit continuer à croître ; tout comme nous devons continuer à créer de la valeur et conserver une capacité d’adaptation permanente.  Sur un marché de plus en plus concurrencé et de plus en plus internationalisé, c’est un impératif.

Propos recueillis par Caroline Castets

 

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