En 2013, l'entrée de Criteo au Nasdaq marquait sa sortie du cercle très fermé des licornes françaises. Porté par un chiffre d'affaires en croissance de 36 % en 2016, le spécialiste français du reciblage publicitaire sur Internet a vu sa valorisation boursière franchir la barre des trois milliards de dollars. Explications de son directeur financier et directeur général délégué, Benoît Fouilland.

Décideurs. Quels ingrédients sont nécessaires pour qu'une entreprise accède au statut de licorne ?

Benoît Fouilland. Il faut tout d’abord se placer sur une opportunité de marché très large. Pour Criteo, le marché de la publicité à la performance offrait cette occasion, c’est aussi le cas de Blablacar, licorne française symbolique, qui s’est placée sur le secteur des transports là où le besoin était fort. En second lieu, l’entreprise doit apporter une innovation dans le marché en répondant de manière nouvelle à un besoin, en créant une rupture. Pour finir, il faut voir grand très tôt et savoir être ambitieux : ne pas hésiter à lever plus de fonds que ce qui était strictement nécessaire et viser l’international.

Vous réalisez l'essentiel de votre chiffre d’affaires hors des frontières. Comment avez-vous réussi une internationalisation si rapide de votre activité ?

Si vous montez une entreprise en Europe et que vous souhaitez vous développer rapidement, il faut s’exporter à l’international. Il est plus complexe de faire émerger une société à fort potentiel de valorisation en France car le marché domestique est plus réduit. Il est aussi plus difficile pour les entreprises françaises de se développer dans les secondes et troisièmes phases d’investissement, qui impliquent des montants plus conséquents et donc des niveaux de risque plus forts. Ces contraintes expliquent par ailleurs le peu de licornes présentes en France. Criteo a su être pionnier sur ce secteur et faire entrer tôt des investisseurs internationaux dans son capital. Je pense que ce mouvement va se développer en France.

Le tissu des start-up à potentiel « licorne » est nettement plus dense aujourd’hui qu’il y a cinq ans.

Quels risques découlent de ce statut ?

Quand vous êtes une licorne, vous êtes forcément plus visible et donc plus vulnérable. Une croissance très rapide peut créer une pression supplémentaire car il faut pouvoir justifier la valorisation pour laquelle les investisseurs ont payé. De plus, le potentiel de développement très rapide de votre marché peut attirer d’autres acteurs.

Quels conseils donneriez-vous aux entreprises françaises désireuses d'accélérer leur développement et d'internationaliser leur activité ?

Ne vous focalisez pas trop sur le fait de devenir une licorne, mais plutôt sur la maximisation du potentiel de l’entreprise. Si vous êtes dans le bon marché, si vous avez créé une rupture et que vous avez su vous implanter à l’international, alors vous en deviendrez une. Être une licorne c’est une conséquence, pas un but. Et surtout, il faut voir grand dès le début. La France possède des atouts extraordinaires et il nous manque parfois cet élan d’ambition, se dire qu’on est capables de bâtir un acteur mondial dans son domaine.

Propos recueillis par Mathilde Pujol.

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