Arash Attar-Rezvani : L’équilibriste

Mohamed Ali, survolant le ring. Impossible de rater le superbe tirage en noir et blanc accroché dans son bureau. « Mon père est photographe. Il nous emmenait tous les samedis dans les musées et les galeries », se souvient Arash Attar-Rezvani. Une sensibilité artistique qui s’affiche sobrement sur ses murs et occupe une place de choix sur les étagères où monographies de Martin Parr et de Josef Koudelka côtoient ouvrages juridiques et autres codes. Ce qui pourrait apparaître de prime abord comme un grand écart un peu incongru entre deux mondes aux antipodes constitue en fait un mode de vie pour l’avocat qui a fait de la recherche de l’équilibre son mantra.

Jongleur patenté

Né en France de parents iraniens, très proche de ses frères d’origine jamaïcaine, marié à une femme colombienne, Arash Attar-Rezvani a appris à jongler avec différentes cultures et quatre langues. Une ouverture au monde qui le prédestinait naturellement à une carrière internationale. Restait à identifier la voie. « Encore collégien, une conseillère m’a orienté vers le droit. Je n’ai cessé de la bénir depuis lors », explique-t- il. Un choix qui détonne au sein d’une famille d’artistes mais qui présente l’avantage de combiner challenge intellectuel et esprit pratique. Toujours ce fameux équilibre. À l’écouter, plus qu’une formation de haute volée, ses études à Paris, Leiden, Oxford et Columbia lui ont permis d’étancher une partie de sa soif de rencontres. « J’y ai côtoyé des sommités intellectuelles et des champions olympiques, l’alliance du corps et de l’esprit. C’était un foisonnement unique au monde. »

Pied de nez

Entré à 23 ans comme stagiaire chez Skadden, il poursuit son apprentissage, parfois à la dure. « Le cabinet nous a tout de suite responsabilisés. Avec un autre junior, nous avons réussi à mener à bien
une IPO dans le secteur des nouvelles technologies. » Les nuits blanches qui ont émaillé les sept mois de cette première expérience en auraient découragé plus d’un. Lui, au contraire, était persuadé d’avoir trouvé sa place. Une intuition vérifiée après plus de quinze ans passés au sein du cabinet, comme un pied de nez à sa génération réputée adepte du zapping. Cette longévité, il la doit sûrement à sa capacité à savoir couper les ponts pour larguer une vie parisienne trépidante et ultra-connectée. « L’isolement est un réveil », confirme celui qui n’a pas hésité à passer ses vacances dans les endroits les plus reculés, Amazonie ou Sibérie orientale. « Après de longues balades, se retrouver, en plein milieu de la taïga, à chanter la Marseillaise sous la voie lactée tout en se protégeant des ours, c’est indescriptible. »

« Syndrome Avengers »

Malgré le rythme de travail, Arash Attar-Rezvani ne changerait pour rien au monde de profession, trop attaché à son indépendance. Tout juste concède-t- il que l’idée d’un métier permettant de consacrer un peu plus de temps à sa famille pourrait le tenter. S’intéresse-t- il à la politique ? « Oui, bien entendu. » Et de préciser que son véritable engagement n’est politique qu’au sens étymologique. Logique pour un passionné d’histoire antique très impliqué dans le monde associatif. Avec autant de projets, difficile de croire qu’il puisse encore s’octroyer quelques soirées devant Netflix. Il est pourtant formel, lui aussi est régulièrement frappé du « syndrome Avengers ».

• Particulièrement sensible à l’image, aux longs plans sans coupe, à la composition et au mouvement de la caméra, il pourrait un jour écrire un scénario

• Intervenant sur des dossiers très divers, Arash Attar-Rezvani cultive sa polyvalence : « Comme tous les grands acteurs, il faut veiller à ne pas se retrouver cantonné à un type de rôle »

Sybille Vié